ARTICLES 605 ET 606 DU CODE CIVIL APRÈS LA LOI PINEL ET APPLICATION AU LMNP EN RESIDENCES SERVICES

Comme dans toute copropriété, l’occupation et l’exploitation d’un immeuble de LMNP en résidence services génèrent des charges, qui sont réparties entre le propriétaire bailleur et le preneur.

Avant l’entrée en vigueur de la loi Pinel les modalités de répartition de ces charges étaient laissées à la libre appréciation des parties, et le bail commercial réglait le sujet (selon un forfait annuel, au pro rata des millièmes de copropriété, au pro rata de la surface des parties privatives, etc) avec, à titre supplétif, référence au Code Civil.

L’article L. 145-40-2 du Code Commerce introduit et imposé par la loi Pinel est d’ordre public, et vient désormais régir les règles et modalités de répartition des charges entre bailleur et preneur.

La règle de principe est l’application de l’article 1719 du Code Civil, qui s’applique de plein droit au LMNP en résidences services :

– obligation de délivrance

– obligation d’entretien

– obligation d’assurer une jouissance paisible de la chose pendant la durée du bail

1 – Si l’obligation de délivrance ne pose pas de problème d’interprétation, les litiges peuvent survenir en ce qui concerne la répartition des charges d’entretien et de réparation

 

L’art. 1754 du Code Civil énumère les réparations locatives incombant au preneur, de manière peu exhaustive et surtout anachronique puisque les termes employés datent du début du XIXème siècle. On peut, d’une manière élargie, considérer que :

– le bailleur doit fournir, au titre de son obligation de délivrance, un local en état de servir à l’usage auquel il est destiné

– il doit maintenir cet état pendant la durée du bail et donc assumer les conséquences de la vétusté ainsi que toutes les réparations ne rentrant pas dans le champ des réparations locatives visées par l’art. 1754 du Code Civil

– le preneur doit assumer les dépenses de réparations locatives et de menu entretien, et est présumé responsable des dégradations (à distinguer absolument de la vétusté) survenues pendant sa jouissance. L’un des points de vigilance des investisseurs en LMNP en résidences services est celui-ci, il faut s’assurer que l’exploitant n’a pas négligé cette obligation, et ne laissera pas en fin de bail une résidence dégradée par défaut d’entretien, qui sera coûteuse à remettre en état pour intéresser un nouvel exploitant ou permettre une gestion libre aux bailleurs.

2 – La question des travaux de ravalement de l’immeuble

 

Ces travaux sont en principe à la charge du bailleur, puisqu’ils ne relèvent pas des dispositions de l’art. 1754 du Code Civil. Le cas est particulièrement clair en jurisprudence lorsqu’il s’agit :

– de travaux de ravalement portant sur la structure de l’immeuble et donc relevant en tout ou partie de l’art. 606 du Code Civil

– de travaux prescrits par l’Administration, car dans ce cas ils relèvent de l’obligation de mise en conformité incombant au bailleur. Il pouvait toutefois être dérogé contractuellement à ce second cas, avant la loi Pinel, par convention entre les parties, et faire peser cette catégorie de charge sur le preneur.

Si ces travaux de ravalement relèvent d’un entretien courant, au titre de l’art. 605 du Code Civil, ils peuvent être mis à la charge du preneur.

D’un point de vue strictement commercial, voire « marketing », cette clause faisant peser la charge de l’application de l’article 606 sur le preneur est pour nous à regarder avec objectivité: un article 606 a peu d’intérêt pendant les 10 premières années de vie de l’immeuble… ce qui correspond à la couverture de la garantie décennale et finalement n’engage pas l’exploitant. C’est lors du renouvellement du bail qu’il aurait vocation à s’appliquer et à prendre du sens, notamment lorsqu’un exploitant propose un nouveau bail avec une baisse de loyer: s’il s’agit de simplifier et d’équilibrer les relations bailleur / preneur, de revaloriser un actif immobilier qui vieillit et peut présenter des aménagements très spécifiques (EHPAD), et de repartir sur une durée longue (9, 10 ou 11 ans), on peut y voir un réel engagement du preneur dans la durée et en tenir compte dans les demandes de renégociations de loyers ou de modalités d’indexation de ces derniers.

3 – Les limitations à la volonté des parties signataires d’un bail commercial de LMNP en résidences services apportées par la loi Pinel

 

Selon l’art. L 145-40-2 du Code de Commerce, qui est d’ordre public :

– le bail doit énumérer de façon limitative les catégories de charges incombant au preneur

– certaines dépenses ne peuvent plus être répercutées par le bailleur sur le preneur : les grosses réparations relevant de l’art. 606 du Code Civil, les travaux de mise en conformité, les travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté, et les honoraires sur travaux.

– certains impôts, taxes et redevances ne peuvent en principe pas être refacturés. Il s’agit des taxes dont le redevable est le bailleur, mais cette règle connaît 2 exceptions concernant directement les baux commerciaux de résidences services : la taxe foncière et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

– il est interdit au bailleur de refacturer au preneur les frais et honoraires de gestion du local faisant l’objet du bail commercial. Il s’agit en l’espèce des frais de gestion des loyers, non pas des frais de gestion technique de l’immeuble.